19.02.2013

Geneva, 19.2.2013 - Statement by Federal Councillor Didier Burkhalter on the occasion of the 7th Syria Humanitarian Forum - Check against delivery

Speaker: President of the Swiss Confederation, Didier Burkhalter (2014); Didier Burkhalter

Madame la Secrétaire générale adjointe,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,

Le conflit en Syrie fait de cette région un enfer pour plus de 5 millions de Syriennes et Syriens et la situation ne cesse de se dégrader. En vertu du droit international, le gouvernement syrien doit assurer les accès à l’aide et protéger les travailleurs humanitaires. Toutes les parties au conflit sont tenues de respecter les règles du droit international humanitaire. Face à une situation inhumaine qui se dégrade encore, la communauté internationale doit retrouver davantage d’unité: elle doit rester unie pour apporter son aide en coordonnant au mieux l’action humanitaire sur le terrain et en tenant les promesses faites. Elle doit être d’avantage unie pour rechercher activement une solution politique à ce conflit. C’est une question de dignité humaine.

1. Mesdames et Messieurs,
Dans ce contexte, la Suisse remercie le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires des Nations Unies (OCHA) d’avoir réuni ce 7e Forum Humanitaire sur la Syrie, le premier organisé à haut niveau . Cette plateforme internationale sur les actions humanitaires liées à la crise syrienne est extrêmement importante.
 
Elle doit évidemment rester indépendante des discussions sur les solutions à la crise et continuer de se focaliser sur les seuls aspects humanitaires de cette situation, c’est-à-dire sur la manière d’en diminuer les conséquences pour les hommes, les femmes et les enfants affectés. Les acteurs humanitaires fournissent un travail remarquable dans une crise hautement politisée et il est important de continuer à bien faire la part des choses.

2. La Suisse est honorée d’être hôte de ce Forum. L’action de la Suisse peut être décrite ainsi dans le cadre de la crise syrienne:

1) La Suisse apporte une aide humanitaire significative dans la protection et l’assistance aux populations les plus touchées en Syrie et aux personnes réfugiées dans les pays voisins. La Suisse a alloué 30 millions de francs suisses (32 mio USD) à la crise depuis son déclenchement. L’aide humanitaire de la Confédération soutient particulièrement des approches innovantes,  notamment l’aide en espèces fournie à la population affectée en Syrie ainsi qu’aux réfugiés et aux familles hôtes dans les pays voisins. J’aimerais notamment citer notre action directe appelée « cash for host families » qui soutient des familles hôtes libanaises hébergeant des réfugiés. 
Des experts suisses sont par ailleurs en mission pour plusieurs agences onusiennes dans tous les pays voisins de la Syrie, notamment pour la mise en œuvre des programmes d’aide en espèces, d’eau, d’assainissement et d’hygiène ainsi que des programmes de mise en place d’abris pour les réfugiés.

2) Pour mettre un terme à cette spirale de violences, la Suisse soutient par ailleurs une solution politique à la crise, négociée dans un esprit de dialogue. Car aujourd’hui, près de deux ans après le début du conflit en Syrie, la crise perdure. Les efforts de la communauté internationale doivent redoubler. Le seul document, susceptible de rassembler ces efforts, qui existe à ce jour a été adopté ici-même, à Genève, voici 8 mois. Il s’agit de l’accord adopté par le groupe d’action pour la Syrie qui contient les principes devant mener à une transition politique. Il faut que la communauté internationale s’engage avec davantage force pour que cet accord ne reste pas lettre morte.
Il est en outre de la responsabilité du Conseil de sécurité d’intensifier ses efforts pour trouver le moyen de sortir des blocages actuels afin de lui permettre de remplir son mandat, celui que lui confère la Charte des Nations Unies, le maintien de la paix et de la sécurité internationale.  

Car le prix de ces blocages, ce sont les Syriennes et les Syriens, ces femmes, ces hommes et ces enfants  qui le paient hélas de leur sang chaque jour. Il est de la responsabilité du Conseil de sécurité et de la communauté internationale d’intensifier les efforts pour la recherche d’une solution politique à la crise. Car nous le savons tous : la solution ne peut être que politique.

3) La Suisse s’engage pour la lutte contre l’impunité et pour le respect du droit international.  Elle appelle toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire. Les règles de la conduite des hostilités exigent que les parties au conflit prennent toutes les précautions possibles pour épargner les populations civiles et leurs biens. Il n’est pas acceptable que chaque jour des violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme soient commises. Exécutions sommaires, détentions arbitraires, rapts, disparitions forcées, tortures, violences sexuelles ! Voilà les nouvelles qui nous proviennent froidement, chaque jour de la Syrie. Dans le rapport qu’elle a publié hier, la Commission d’enquête indépendante du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, confirme que la Syrie est le théâtre de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et de graves violations des droits de l’homme.

Il est fondamental que les responsables de tels crimes soient jugés.

C’est pour cela que nous avons envoyé le 14 janvier dernier, avec 57 Etats, une lettre au Conseil de sécurité lui demandant de déférer la situation en Syrie à la Cour pénale internationale. D’autres pays peuvent encore s’associer à cette démarche afin de renforcer encore ce message et de prévenir de futures violations contre les populations. Les recommandations de la Commission d’enquête indépendante qui viennent d’être publiées sont en ligne avec cet appel. La Suisse est en effet convaincue que la justice est un élément fondamental pour construire une paix durable après qu’un conflit a cessé.

3. Mesdames et Messieurs,  

Nous constatons avec satisfaction que ce Forum a réussi à réunir – malgré les opinions divergentes – les principaux acteurs internationaux autour de la table afin de trouver ensemble des réponses humanitaires à la crise. Le Forum se veut inclusif et se propose ainsi d’englober tous les acteurs humanitaires impliqués. Cela signifie aussi que de nouvelles réalités par rapport aux acteurs syriens devraient y être reflétées. Nous avons pris note qu’un grand nombre d’Etats a reconnu la Coalition Nationale Syrienne comme la représentante du peuple syrien.
La Suisse elle a pour pratique constante de ne pas reconnaître des gouvernements mais uniquement des Etats. Cependant, face à la crise humanitaire, il est nécessaire d’identifier les acteurs les plus aptes à optimiser l’acheminement de l’aide humanitaire à la population vivant dans les différentes provinces de la Syrie. Cette question brûlante demande des réponses rapides.

4. En même temps, il est crucial que l’aide soit canalisée de manière transparente et à travers des acteurs qui s’en tiennent strictement aux principes humanitaires. L’assistance humanitaire ne peut être instrumentalisée, au risque de perdre sa crédibilité. Nous devons veiller à ce que des factions ou des groupes particuliers ne puissent pas détourner l’assistance humanitaire destinée aux populations affectées. Nous le devons aux victimes dans le besoin. Nous le devons aussi aux contribuables qui financent ces efforts.

5. La Conférence à Koweït du 30 janvier dernier pourrait être la campagne de recherche de fonds la plus réussie de l’histoire des Nations Unies. Elle « pourrait » dis-je, car pour être une vraie réussite il faudra que les engagements pris se transforment en dons effectifs. Nous le devons aux enfants de la Syrie et nous le devons à notre propre crédibilité. Les promesses de fonds ont été généreuses, il faut qu’elles soient tenues.

La Suisse déboursera ce qu’elle a promis. Elle invite tous les Etats à faire de même et à concrétiser pleinement et rapidement leur engagement .

6. Avec les promesses considérables de Koweït, il sera d’autant plus important de renforcer les mécanismes de coordination : Madame la Secrétaire générale adjointe, nous sommes conscients de la complexité de la coordination humanitaire dans un tel contexte et nous saluons vos efforts inlassables et ceux de vos équipes. Il est primordial que le système de coordination des Nations Unis dans toute la région soit fort et clairement structuré. Cela vaut pour la Syrie mais aussi pour les pays voisins accueillant un nombre croissant de réfugiés. 

7. L’accès humanitaire  reste un défi énorme. Le CICR - dont nous fêtons les 150 ans cette année mais qui montre qu’il n’a rien perdu de son énergie et de sa réactivité - les Agences des Nations Unies et leurs partenaires ont pris de grands risques et font preuve d’un engagement extraordinaire pour atteindre les personnes dans le besoin. En relativement peu de temps, ils ont été capables d’augmenter de manière significative l’envergure de leurs opérations, un engagement admirable.
 
Le nombre de personnes ayant bénéficié de l’aide est impressionnant. Nous avons appris des nouvelles encourageantes comme celles du HCR qui a atteint Bab al-Hawa et Azaz (A'azāz) dans le nord-ouest de la Syrie, fournissant 3'000 tentes et 30'000 couvertures tant nécessaires à une population dénuée de tout.

C’est très bien. Mais nous savons tous que ce n’est pas assez. Car l’aide ne parvient pas à suivre le rythme des besoins.
La Suisse rappelle au gouvernement syrien son devoir moral autant que son obligation légale d’autoriser et de faciliter un accès humanitaire rapide et sans entrave à toutes les victimes du conflit.

Il doit notamment faire tout ce qui est en son pouvoir pour faciliter le déroulement efficace des opérations humanitaires. L’accord récent sur l’importation de carburant à des fins humanitaires est un pas important, de même que la liste des 110 organisations locales autorisées à collaborer. Nous nous en réjouissons.

8. Toutefois, face à la situation grave, cela a pris trop de temps et cela demeure insuffisant. En novembre 2012, les Nations Unies ont soumis une liste de 10 ONG internationales additionnelles prêtes à opérer en Syrie. Elles disposent de capacités reconnues et du personnel nécessaire.

Trois d’entre elles semblent avoir été autorisées à opérer ce qui est une bonne nouvelle. La liste des 7 autres semble toujours en examen auprès des autorités syriennes. Ces accréditations supplémentaires doivent elles aussi se faire et le plus vite possible. Les acteurs humanitaires ont besoin de ces partenaires maintenant. Dans cette situation, la Suisse se met à disposition pour soutenir ce processus d’accréditation par son expertise. 

9. Si le gouvernement syrien n’est pas en mesure de garantir un accès rapide, libre et sans entrave de l’assistance humanitaire dans une partie importante de son territoire, nous l’invitons à songer à d’autres options. Pour reprendre l’exemple d’Azaz et de Bab al-Hawa : la population affectée aurait pu bénéficier de l’aide bien plus rapidement et facilement depuis la Turquie.

Nous invitons donc le gouvernement syrien, conformément aux principes définis dans la résolution 46/182 de l’Assemblée Générale des Nations Unies , à autoriser des opérations humanitaires transfrontalières coordonnées par les Nations Unies et le CICR, en accord avec les pays voisins. 

Nous sommes persuadés que cette mesure est aussi dans l’intérêt du gouvernement syrien, non seulement pour mieux aider sa population civile mais également afin d’éviter que ne se multiplient les opérations transfrontalières clandestines.

10. Un accès transfrontalier avec des chemins plus courts est aussi un moyen qui peut diminuer les risques pour les travailleurs humanitaires. Ces derniers doivent être protégés à tout moment. Le fait que des travailleurs humanitaires et leur matériel sont délibérément ciblés est une violation grave du droit international humanitaire et un manquement inadmissible aux devoirs des parties au conflit.

11. Pour conclure j’aimerais exprimer la reconnaissance et l’admiration de la Suisse envers les Etats voisins de la Syrie pour la manière dont ils gèrent ce grand défi lié aux réfugiés tout en gardant leurs frontières ouvertes. Ce soutien, en collaboration avec l’action des Agences onusiennes, du CICR et des partenaires pour le bien de plus de 700'000 réfugiés enregistrés, est essentiel. Il permet aussi d’éviter que les réfugiés, qui ont déjà dû quitter leur terre et leurs biens, ne soient contraints de pousser encore plus loin leur fuite. Leur présence dans les pays limitrophes permet de les laisser intégrés dans la culture de la région et de les maintenir proches de leurs racines. Nous maintenons ainsi l’espoir d’un retour rapide des ces Syriennes et de ces Syriens dans leur patrie, dès la fin de ce cauchemar.
 
Pendant que ce terrible conflit perdure, il y a des règles à respecter par toutes les parties au conflit, les règles du droit international humanitaire. Assurer l’accès à l’aide humanitaire et protéger les travailleurs humanitaires est plus nécessaire et urgent que jamais. La communauté internationale s’engage ainsi pour une action forte en faveur de la population syrienne. Mais l’engagement ne s’arrête pas là. La communauté internationale doit chercher activement davantage d’unité et travailler assidument à une issue rapide de cette grave crise. Le processus politique doit continuer et des négociations doivent avoir lieu pour faire cesser le conflit armé.

Il faut que notre monde s’engage pour assurer la paix en Syrie et une vie en liberté et en sécurité pour toute la population syrienne.
Je vous remercie de votre attention.


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